La parution le 1er mai 2022 du “code pénitentiaire” présenté dans un article précédent met en exergue plusieurs évolutions notables des textes législatifs concernant l’incarcération :
LE QUOTIDIEN CARCERAL
«Le travail»
Les articles 19 à 22 de la loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 ont modifié le droit du travail en prison et ont été précisé par le décret n°2022-655 du 25 avril 2022. L’acte d’engagement unilatéral est remplacé par le contrat d’emploi pénitentiaire (CEP). Toute nouvelle relation de travail conclue à partir du 1er mai 2022 prend d’un CEP. Les actes d’engagement unilatéraux conclus avant cette date doivent être transformés en CEP d’ici au 31 décembre 2022. Au 1er janvier 2023, toutes les relations de travail pénitentiaire feront l’objet d’un CEP.
L’accès au travail est désormais encadré : la personne détenue doit demander à travailler, en précisant éventuellement sous quel régime, par exemple au service général de la prison ou en atelier de production. Cette demande donne lieu à une décision de classement prise par le chef d’établissement, qui précise le ou les régimes selon lesquels la personne peut être employée, et dont le refus ne peut être motivé que « pour des motifs liés au bon ordre et à la sécurité de l’établissement ». La personne détenue classée est alors placée sur la liste d’attente d’affectation de l’établissement et peut candidater à des offres. L’administration pénitentiaire organise des entretiens professionnels avec les donneurs d’ordre, par exemple l’administration pénitentiaire pour le service général, une entreprise privée pour un atelier de production. Ces derniers opèrent un choix, sur la base duquel le chef d’établissement prend, le cas échéant, une décision d’affectation sur le poste de travail sous réserve, là encore, du bon ordre et de la sécurité de l’établissement. Cette décision d’affectation, formalisée par la signature du CEP, constitue la véritable porte d’entrée dans le travail. La personne détenue peut contester la décision de refus de classement et, dans le cas où le chef d’établissement refuse d’affecter à un poste de travail un candidat qui aurait été choisi par le donneur d’ordre à l’issue d’un entretien, celle de refus d’affectation.
Le CEP doit contenir des mentions obligatoires (article R.412-25 du code pénitentiaire), en particulier la description du poste de travail et des missions et le montant de la rémunération. Le CEP peut être à durée déterminée ou indéterminée. Les cas dans lesquels il est autorisé ou interdit de conclure un CEP à durée déterminée sont encadrés, mais il n’y a ni durée maximale, ni nombre maximal de renouvellements. Les nouvelles dispositions établissent également une liste non exhaustive de motifs légitimes d’absence de la personne détenue, notamment les convocations, entretiens, motifs disciplinaires, permissions de sortir, visites ou rendez-vous médicaux (article D.412-32 du code pénitentiaire). Les jours fériés sont chômés et ne donnent pas lieu à rémunération, sauf nécessité de bon fonctionnement de l’établissement pénitentiaire (dans ce cas, la rémunération est classique ; doublée uniquement le 1er mai). Les dispositions relatives au temps de travail entreront en vigueur à une date ultérieure, au plus tard fin 2023 (durées minimale et maximale de travail, aménagements du temps de travail, temps partiel et heures complémentaires, heures supplémentaires, astreintes). La suspension et la rupture de la relation de travail sont également encadrées. La personne détenue peut contester les décisions de fin de classement et de fin d’affectation, mais pas la suspension.
Une circulaire doit encore venir préciser les modalités d’application de ces nouvelles dispositions. Une ordonnance, attendue pour fin 2022, établira les modalités dans lesquelles les personnes détenues bénéficient de certains droits en matière de protection sociale.
CONNAITRE ET FAIRE RESPECTER SES DROITS
Un recours contre les conditions de détention indignes auprès du juge judiciaire a été créé par l’article 803-8 du code de procédure pénale : toute personne détenue qui considère que ses conditions de détention sont contraires à la dignité de la personne humaine peut saisir le juge des libertés et de la détention, si elle est en détention provisoire, ou le juge de l’application des peines, si elle est condamnée et incarcérée en exécution d’une peine privative de liberté, afin qu’il soit mis fin à ces conditions de détention indignes. Voir aussi :
décret d’application n° 2021-1194 du 15 septembre 2021;et circulaire du 30 septembre 2021 de présentation des dispositions (JUSK2129245C).
LES AMENAGEMENTS DE PEINE
«Les acteurs de l’aménagement de peine»
L’article 712-4-1 du code de procédure pénale a été complété : en plus du procureur de la République, du chef d’établissement pénitentiaire et d’un représentant du Spip, la commission de l’application des peines est désormais également composée d’un représentant du personnel de surveillance.
« Les réductions de peine »
Pour les personnes placées sous écrou à compter du 1er janvier 2023, les crédits de réduction de peines sont supprimés. Le nouveau régime de réduction de peines est régi par l’article 721 du code de procédure pénale : le juge de l’application des peines peut accorder une réduction de peine aux personnes condamnées « qui ont donné des preuves suffisantes de bonne conduite et qui ont manifesté des efforts sérieux de réinsertion ». Cette réduction ne peut excéder six mois par année d’incarcération et quatorze jours par mois pour une durée d’incarcération inférieure à un an. Ces durées maximales de réduction sont inférieures pour les personnes condamnées pour certains types d’infraction (voir articles 721-1-1 et 721- 1-2) et dans certains autres cas (voir article 721 alinéa 8). Une réduction de peine exceptionnelle, dont le quantum peut aller jusqu’au tiers de la peine prononcée, peut être accordée dans certains cas (voir articles 721-3 et 721-4).
/!\ Le régime antérieur continue de s’appliquer aux personnes placées sous écrou avant le 1er janvier 2023.
«La libération sous contrainte»
L’article 720 du code de procédure pénale a été complété par un dispositif de libération sous contrainte « de plein droit » lorsqu’il reste au condamné exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté d’une durée totale inférieure ou égale à deux ans un reliquat de peine à exécuter (après déduction des réductions de peine) qui est inférieur ou égal à trois mois, sauf en cas d’impossibilité matérielle résultant de l’absence d’hébergement. Sont exclues de ce dispositif « de plein droit » les personnes condamnées incarcérées pour certains types d’infraction ainsi que les personnes détenues ayant fait l’objet, pendant la durée de leur détention, d’une sanction disciplinaire prononcée pour certains faits (voir article 720 « III »). Ce dispositif est applicable à compter du 1er janvier 2023, quelle que soit la date de commission de l’infraction.